Recrutement dans l’armée
Quel est l’enjeu ?
Depuis l’entrée en vigueur en 2002 du Protocole facultatif des Nations Unies concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés, il est interdit aux États ayant ratifié le traité d’envoyer des recrues de moins de 18 ans à la guerre. Mais certains pays, y compris ceux à hauts revenus, continuent de recruter des mineurs pour des entraînements militaires avant de les déployer, ce qui comporte des risques pour les droits et le bien-être des enfants. Les trois quarts des pays du monde ne recrutent plus les mineurs de moins de 18 ans dans leurs armées, mais parmi ceux qui le font toujours, il y a le Royaume-Uni sur lequel nos recherches ont porté jusqu'à présent.
Le Royaume-Uni est l’un des 15 pays au monde qui continue à recruter à partir de 16 ans; c’est le seul pays européen et le seul membre de l’OTAN à recruter à cet âge. Les moins de 18 ans représentent un quart des nouvelles recrues britanniques, la majorité d’entre eux ayant 16 ans. Un certain nombre d’autres pays à hauts revenus - y compris la France, l’Allemagne, les États-Unis et le Canada - recrutent les enfants à partir de 17 ans, mais ils représentent une proportion plus faible du nombre total de recrues. Il y a bien sûr des différences importantes entre le recrutement de mineurs par les armées dans ces pays et l’exploitation des enfants par les armées et les groupes armés dans des situations de conflit mondial, mais les efforts mondiaux pour mettre fin au recrutement des enfants sont compromis lorsque les États les plus puissants de la planète continuent de soutenir, contre toute évidence, que l'enrôlement précoce est bénéfique.
Quel est le problème ?
L’enrôlement des enfants dans l’armée est fondamentalement incompatible avec leurs droits et leur bien-être. Les études menées sur le Royaume-Uni révèlent que les entraînements militaires imposent un intense stress psychologique et physique sur les jeunes recrues, ce qui peut entraîner des complications à court et long termes. Des études montrent que les soldats qui s'engagent à un plus jeune âge connaissent des taux plus élevés de problèmes de santé mentale et de comportement que les recrues plus âgées et que leurs pairs du monde civil ; ils sont également plus susceptibles d'être blessés pendant l'entraînement.
Le recrutement militaire encourage également les jeunes à quitter prématurément le système éducatif. Au Royaume-Uni, les recrues sont les seuls jeunes de moins de 18 ans qui n'ont pas à participer à un niveau minimum d'éducation chaque année, et le peu d'éducation qu'ils reçoivent dans l’armée est d'un niveau inférieur à celui du système civil d'éducation. Un tiers des jeunes de moins de 18 ans qui s'engagent dans l'armée abandonnent en cours de formation, et nombre d'entre eux finissent sans diplôme et sans emploi.
Il est particulièrement inquiétant de constater que l'armée britannique recrute des jeunes de moins de 18 ans principalement pour les placer plus tard sur des postes de première ligne, en particulier dans l'infanterie, qui subit plus de pertes à la guerre que toute autre unité de l’armée. Pendant la guerre en Afghanistan, par exemple, les soldats britanniques qui s'étaient engagés à 16 ans et avaient terminé leur formation avaient deux fois plus de chances de mourir en déploiement que les recrues adultes.
L'armée peut également constituer un milieu hostile pour de nombreuses jeunes recrues issues de milieux pauvres, ainsi que pour les femmes, les personnes LGBT et les minorités religieuses et ethniques. L'intimidation et le harcèlement sont plus fréquents dans l'armée que sur les lieux de travail civils. Ainsi, selon l'enquête sur le harcèlement sexuel dans l'armée, 35 % des femmes soldats en 2021 ont déclaré avoir été victimes d'une expérience de harcèlement sexuel "particulièrement bouleversante" au cours de l'année précédente.
Quelle est la solution ?
Toutes les armées du monde devraient adopter une politique de recrutement militaire à partir de 18 ans. Tous les gouvernements, y compris le Royaume-Uni, doivent reconnaître que l’enrôlement d’enfants dans l’armée n’est pas dans leur intérêt. Recruter à partir de 16 ans est un choix politique, pas une nécessité, la plupart des pays étant en mesure de doter leur armée d'un personnel efficace en ne recrutant que des adultes ; les études montrent que le Royaume-Uni pourrait faire de même. Cette réforme bénéficie d'un large soutien de la part du Comité des droits de l'enfant des Nations Unies, de la Commission parlementaire mixte sur les droits humains et des quatre Commissaires à l'enfance du Royaume-Uni qui ont demandé que l'âge de recrutement soit élevé à 18 ans tout comme l’ont fait des organisations de défense des droits de l'enfant, des parlementaires, des groupes religieux, des groupes d’anciens combattants, des professionnels de la santé et les jeunes eux-mêmes.
Ce que CRIN fait à ce sujet
Domaines d'intérêt connexes
Ressources (en anglais)
Briefing: Two-page paper making the case for setting 18 as the minimum age for recruitment.
Report: British army: Harm and abuse of child recruits, a timeline
To read the testimonies from the above report, visit here.
Report: The Pressure Cooker: Child recruitment and suicide in the British armed forces
Report: Conscription by poverty outlines how army recruitment in the UK impacts especially young people from poorer backgrounds.
Report: Why 18 Matters presents the case for setting 18 as the global minimum enlistment age.
Myth-busting booklet: Soldiers at 16: Sifting Fact from Fiction.
Resource hub: This page collates all our resources on the military enlistment of children.
Related content: